Mes favoris
Une pause au Domaine Valga
Rédaction
Nathalie Le Coz, partage avec nous ses rencontres avec des Bas-Laurentiens qui ont tracé leur propre chemin.
Pour se rendre au Domaine Valga, il faut tourner le dos au fleuve pour s’approcher des montagnes, vers Saint-Gabriel. Bien qu’il soit usé, l’éperon appalachien qui s’avance ici est imposant. Avec le mont Comi comme point culminant, le massif dévore une bonne part du paysage.
À proximité de Saint-Donat-de-Rimouski, on emprunte un chemin sinueux. Le couvert forestier s’épaissit, nous enveloppe, tandis qu’on grimpe les flancs de la montagne. Composée majoritairement de feuillus, la forêt est resplendissante de rouge et d’or en ce début d’octobre. La canopée, elle, laisse apparaître des trouées d’un bleu profond.
Puis, l’odomètre et le rythme cardiaque ralentissent comme par enchantement. Plus rien ne presse. À petite vitesse, on peut imaginer ce même environnement se couvrir de blanc, puis exploser de vert tendre avant de s’assombrir en un feuillage impénétrable. Nous y voilà.
Quelques bâtiments en bois rond s’érigent autour d’un petit lac ouvert comme un œil. Un homme jovial m’accueille, tire deux chaises au soleil sur la galerie et se raconte.
Forestier de métier, Éric Gagné a un jour voulu changer de vie. Un vieil oncle missionnaire l’avait informé qu’une terre appartenant aux Frères du Sacré-Cœur allait être mise en vente : 92 acres comportant une cédrière exceptionnelle. Apparemment, sans se heurter à beaucoup de résistance, il convainc sa blonde d’y bûcher, de construire une auberge et de s’y installer. Il y a de cela une vingtaine d’années, ils créent ainsi le Domaine Valga.
Les hôtes tardent toutefois à venir. Le domaine ne parvient pas à endiguer le surplus de clientèle des hébergements qui débordent autour de Rimouski. Mais Éric Gagné déborde d’imagination! Il rencontre les organisateurs de voyages européens qui lui envoient bientôt des groupes en quête d’une bonne table typiquement québécoise, simple et généreuse. D’autres Européens s’installent un temps dans ces chalets à l’écart du monde… on s’en doute, plusieurs d’entre eux y reviendront régulièrement. Puis, des « locaux » découvrent les joies de ses installations d’hébertisme aérien « Arbre en Arbre » et de sa flotte de canots et de kayaks qui les attendent au quai du lac des Frères.
Éric Gagné a ensuite mis sa fille et son fils dans le coup. Aujourd’hui, la moitié de l’entreprise leur appartient et les décisions font l’objet de caucus familiaux où chacun déploie ses forces et préférences. Récemment, le fils s’est investi dans la construction d’une cabane à sucre et l’exploitation acéricole. Ensemble, ils construiront bientôt de nouveaux chalets pour accueillir des petits groupes et des familles.
La fibre entrepreneuriale d’Éric Gagné et de son clan est incontestable, mais aussi réfléchie. Ils développent et cherchent à faire des bons coups, mais pas au détriment de leur propre plaisir à habiter cet espace d’exception. Bref, ils partagent leur forêt avec nous. En retour, les gens qui viennent au Domaine Valga pour un mariage, un party de Noël ou une réunion d’affaires s’y sentent chez eux.
S’il le faut, Éric Gagné se lèvera aux petites heures pour préparer un café bien chaud aux visiteurs qui ont un traversier à prendre. Doté d’une joie de vivre contagieuse, il est convaincu que le touriste de demain voudra parler, jaser — qu’il sera à la recherche d’un contact humain. Parce que c’est justement cet aspect personnel qui fera défaut.
Le soleil a tourné le coin de la galerie, nous jetant dans l’ombre. J’ai quitté ma chaise, serré la main de mon hôte, et suis parti avec l’assurance que chez cet aubergiste-là, le futur touriste ne sera jamais déçu!
Vous avez aimé cet article?
Vous pourriez aussi être intéressé·e par ceux-ci
@BasSaintLaurent
Utilisez le mot-clic #BasSaintLaurent ou identifiez-nous sur vos photos pour nous partager vos photos de voyage et vos moments forts!